Point de vue économique - juin 2018

Abaissement de nos prévisions de croissance mondiale : les raisons

27/06/2018

Pour la première fois depuis 2016, nous avons abaissé nos prévisions concernant la croissance mondiale. Nous en expliquons les raisons dans le présent article.

Bien que la croissance demeure robuste, nous observons plusieurs facteurs qui devraient avoir un impact négatif sur la croissance mondiale en 2018 et 2019.

En conséquence, nous avons pour la première fois depuis près de deux ans revu à la baisse nos prévisions, de 3,5 % à 3,4 % en 2018 et de 3,3 % à 3,2 % en 2019. Dans le même temps, l’inflation mondiale devrait progresser (d’où une révision à la hausse de nos prévisions pour 2018 de 2,4 % à 2,7 %) au point d’avoir des répercussions sur les politiques monétaires adoptées à l’échelle mondiale.

Graphique 1 : Prévisions établies par Schroders concernant la croissance du PIB réel pour 2018 et 2019

 

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Source : Schroders, Thomson Datastream, Consensus Economics, mai 20181

 

Un début d'année atone

L’année n’a pas débuté sur un rythme particulièrement soutenu dans la plupart des économies. En Europe, un hiver rigoureux et une épidémie de grippe, des grèves dans les transports et les dates des congés de Pâques semblent avoir pesé sur les chiffres de la croissance.

En outre, la croissance américaine a également fléchi. Après un élan ponctuel en fin d’année dernière, attribuable aux dépenses de reconstruction et de remplacement ayant fait suite à la période des ouragans, cet impact s’est atténué et la croissance a reflué au premier trimestre 2018.
Par ailleurs, plusieurs économies émergentes ont également vu leurs statistiques diminuer au premier trimestre, notamment la Russie et le Brésil.

La plupart des facteurs de ce ralentissement devraient disparaître, ce qui devrait permettre une normalisation de l’activité durant le trimestre en cours. Il faut pourtant bien reconnaître que les indicateurs avancés émettent des signaux mitigés sur un éventuel rebond de la croissance au deuxième trimestre. Sans oublier de mentionner que la hausse des cours du pétrole et les tensions commerciales pourraient contribuer à un ralentissement économique.

 

Hausse des cours du pétrole

Ces derniers ont fortement augmenté depuis le début de l’année en raison d’une réduction de sa production par l’OPEP et de nouvelles sanctions probables contre l’Iran après la rupture par le Président Trump de l’accord sur le nucléaire. Cette hausse aura des répercussions sur les dépenses de consommation.

Aux États-Unis par exemple, elle coûtera aux consommateurs de l’ordre de 60 milliards de dollars. Dans la mesure où ceux-ci jouissent d’une économie de 120 milliards de dollars grâce aux réductions d'impôts votées par le Président Trump, la moitié de leur épargne servira donc à régler leur facture de carburant. S’agissant des foyers percevant un revenu situé dans le dernier quintile, la hausse des prix du carburant fera plus que gommer l’effet de ces réductions d'impôts. Globalement, les dépenses réelles des ménages devraient diminuer en conséquence.

La question clé est de savoir si les travailleurs pourront compenser cette perte de pouvoir d’achat par une hausse de leurs salaires. Si ces derniers ont été étonnamment atones jusqu’à aujourd’hui, de récentes données laissent entendre que cette situation pourrait changer.

Parmi les grands marchés émergents, la croissance de l’Inde devrait également pâtir de ce contexte de hausse des prix du pétrole compte tenu de ses volumes d’importation de cette matière première, alors que la Russie devrait bénéficier de cette tendance, même si ces avantages seront atténués par l’impact des sanctions américaines.

 

Des négociations commerciales tendues

En bref, les États-Unis et la Chine se menacent mutuellement de mettre en place des tarifs douaniers d’un montant de 50 milliards de dollars. Bien qu’ils portent sur une faible proportion des activités commerciales de chaque pays, sans parler du PIB (moins d’un pour cent pour la Chine), leur impact sur la croissance devrait être plus important car il est improbable que ce conflit ne donne pas lieu à une escalade, sous la forme d’autres hausses de tarifs douaniers.

Les incertitudes concernant le devenir de ces relations commerciales devraient peser sur les décisions de recrutement et d’investissement des entreprises, notamment celles qui exportent. Conjugué à certaines mesures politiques, cela nous conduit à abaisser nos prévisions concernant la croissance chinoise (de 6,5 % à 6,4 %), ce qui explique en partie la baisse modérée de nos prévisions concernant la croissance mondiale pour 2019.

 

Hausse de l’inflation

La hausse des cours du pétrole entraînera une accélération de l’inflation à l’échelle mondiale. Même aux États-Unis, l’inflation sous-jacente augmentera d'après nous au cours des deux prochaines années.

En Europe, la conjugaison de la hausse des prix de l’énergie et du recul du taux de change USD/EUR se traduira également par un regain d’inflation.

Au sein des marchés émergents, l’inflation demeure anémique sur des bases historiques, mais elle commence à s’accélérer au Brésil, en Inde et en Russie.

Graphique 2 : Prévisions d’inflation établies par Schroders pour 2018 et 2019 (indice des prix à la consommation)

 

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Source : Schroders, Thomson Datastream, Consensus Economics, mai 2018 (voir également la note de bas de page)

 

Quelles conséquences en matière de politique monétaire ?

Au sein de la plupart des marchés développés, les responsables devraient durcir leur politique monétaire. Aux États-Unis, nous tablons sur trois relèvements supplémentaires de ses taux d'intérêt par la Réserve fédérale cette année et deux autres l’an prochain, de sorte que le taux des Fed funds devrait atteindre les 3 % d’ici à la mi-2019.

Il est prévu que la Banque centrale européenne (BCE) mette un terme à son programme d'assouplissement quantitatif au quatrième trimestre de cette année et qu’elle relève ses taux directeurs à trois reprises en 2019, mettant ainsi un terme à une période de taux négatifs au sein de la zone euro. La Banque d'Angleterre devrait rester attentiste jusqu’en novembre, afin d’en savoir plus sur le résultat des négociations sur le Brexit.

Dans les marchés émergents, la banque centrale brésilienne devrait éviter de continuer d’assouplir sa politique et entamer un cycle de durcissement monétaire progressif en 2019. En Inde, nous anticipons un durcissement légèrement plus rapide en raison de sa dépendance à l’égard du pétrole : nous tablons ainsi sur deux relèvements cette année (dont le premier en juin) qui porteront le taux directeur à 6,5 %, et sur deux relèvements supplémentaires en 2019.

À l’inverse, le recul de l’inflation et des problèmes de liquidité justifient la politique opposée de la Chine, où la People's Bank of China (PBoC) a abaissé son ratio de réserves obligatoires (RRR), qui détermine le montant minimum de réserves que les banques chinoises doivent conserver et qui est utilisé par la banque centrale comme un moyen de lutter contre l’inflation. Une baisse des taux d'intérêt pourrait également se justifier en 2019 en Chine, dont la croissance pourrait être encore ralentie par les tensions commerciales qui vont peser sur le sentiment.

Dans cet environnement, le dollar risque encore de s’apprécier sur le court terme, avant de diminuer en 2019 à mesure que les banques centrales hors États-Unis commenceront à durcir leurs politiques monétaires.

 

L’expansion reste une réalité, mais les prévisions laissent craindre une période de stagflation

Nous sommes toujours d’avis que l’économie mondiale connaîtra une autre année d’expansion, mais les prévisions évoquent désormais la possibilité d’une stagflation sous l’effet d’un regain d’inflation et d’une croissance inférieure. Cette évolution est le résultat de la hausse des cours pétroliers et de la menace intensifiée de guerre commerciale.

 

1 Données de marché au 24/05/2018. Les prévisions précédentes correspondent à février 2018. Les chiffres du consensus relatifs à l'inflation des marchés émergents valent pour la fin de la période sous revue et ne sont pas directement comparables. Marchés développés : Australie, Canada, Danemark, Zone euro, Israël, Nouvelle-Zélande, Singapour, Suède, Suisse, Royaume-Uni, États-Unis. Marchés émergents : Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Mexique, Pérou, Chine, Inde, Indonésie, Malaisie, Philippines, Corée du Sud, Russie, République tchèque, Hongrie, Pologne, Roumanie, Turquie, Ukraine, Bulgarie, Croatie, Lettonie, Lituanie.

Le contenu du document Talking Economics est inspiré du Point de vue économique et stratégique de Schroders, rédigé par l'équipe d'économistes de Schroders : Keith Wade, Économiste en chef, Azad Zangana, Économiste senior pour l'Europe, Craig Botham, Économiste pour les marchés émergents et Piya Sachdeva, économiste pour le Japon.

 

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