Gestion obligataire mondiale flexible : vues mensuelles - novembre 2024
La politique budgétaire à nouveau au centre des débats.
Authors
Longtemps en retrait, la politique budgétaire est redevenue un moteur essentiel des marchés depuis le début de la pandémie de Covid. Les résultats des élections aux États-Unis ouvrent la voie à un éventuel assouplissement fiscal, tandis que la Chine commence à prendre des mesures pour contrer son ralentissement industriel, bien que la réaction des marchés ait été mitigée jusqu'à présent.
Le gouvernement britannique, qui affichait une certaine prudence avant le budget d'octobre, a surpris avec des mesures de relance inattendues. Pendant ce temps, la zone euro emprunte une direction différente, envisageant un resserrement budgétaire prévu pour l’année prochaine. Cependant, les élections à venir en Allemagne pourraient impulser un virage vers une politique budgétaire plus expansionniste.
Ces événements influencent notre vision des marchés de deux manières. D'une part, la perspective d'un nouvel assouplissement fiscal aux États-Unis, dans une économie déjà robuste, augmente la probabilité d'un scénario de non-atterrissage. D'autre part, la divergence des trajectoires budgétaires offre des opportunités pour identifier de la valeur dans les obligations, les devises et l'allocation d'actifs.
Risque croissant d’un non-atterrissage
Source : Équipe de Gestion obligataire mondiale flexible au 17 novembre 2024.
À titre illustratif uniquement. Un « atterrissage en douceur » désigne un scénario dans lequel la croissance économique ralentit et les pressions inflationnistes s’atténuent. Un « atterrissage brutal » désigne à l’inverse une chute brutale de l’activité économique nécessitant potentiellement des baisses de taux d'intérêt supplémentaires. Dans un scénario « sans atterrissage », l’inflation demeure persistante, impliquant que les taux d’intérêt pourraient rester élevés plus longtemps.
Quels changements à venir sous la présidence Trump ?
Bien qu’il ne prenne officiellement ses fonctions que dans deux mois, le président élu Trump se montre déterminé à agir rapidement dès le début de son second mandat. Les politiques prioritaires restent floues, mais les marchés continueront d’ajuster leurs attentes au fur et à mesure que les détails émergeront. Nous anticipons les évolutions suivantes :
- À court terme, les indicateurs de confiance et le dynamisme économique devraient augmenter à mesure que le sentiment des entreprises s'ajuste à la perspective d'un environnement réglementaire plus souple.
- Malgré l’éventail large des options budgétaires, l’effet global devrait stimuler légèrement l’économie comparé aux attentes pré-électorales. Il est également envisageable qu’un assouplissement fiscal plus agressif soit adopté, ce qui aurait été difficile à réaliser avec un Congrès divisé. L'impact réel sur l'économie se manifestera probablement dès 2026, mais les plans budgétaires pour 2025 sont en grande partie décidés. Nous prévoyons une amélioration du déficit budgétaire grâce à une économie plus robuste et à des recettes fiscales accrues, tout en respectant les limites de dépenses établies par l’administration Biden. Cependant, les investisseurs pourraient ajuster leurs attentes en amont de ces changements.
- Des politiques d’immigration plus strictes pourraient réduire l’apport de main-d’œuvre, un élément clé pour maintenir un atterrissage en douceur. L’incertitude autour de cette question reste élevée : observera-t-on une baisse de la main-d'œuvre en proportion de la population en raison des déportations, ou simplement des augmentations plus lentes ? La croissance de l’emploi possible, sans resserrement du marché du travail, devrait se rapprocher de 100 000 par mois, un niveau similaire à celui d'avant la pandémie. Si les politiques deviennent encore plus restrictives, ce chiffre pourrait chuter sensiblement.
- Une politique commerciale mondiale plus aggressive semble inévitable. Qu'elle soit universelle ou ciblée, elle ajoute une pression négative supplémentaire au cycle manufacturier mondial déjà affaibli. La confiance des entreprises dans les régions les plus susceptibles d’être affectées, comme l’Europe, sera ébranlée même si les détails des politiques demeurent incertains.
Impact sur les perspectives américaines
L’économie américaine s’est montrée robuste à l’approche des élections, avec une croissance annualisée de 2,5 % sur les trois premiers trimestres de l’année. Les indicateurs suggèrent que les secteurs des services domestiques et de la consommation sont en bonne santé. Le marché du travail, qui avait montré quelques signes de fragilité au cours de l’été, semble équilibré après les révisions des données et un faible nombre de licenciements. Toutefois, l’ampleur de la croissance de l’emploi (la mesure dans laquelle l’ensemble de l’économie participe plutôt que seulement certains secteurs) et le taux de démissions (le pourcentage de travailleurs qui choisissent de quitter leur emploi) restent des risques à surveiller.
En septembre et octobre, l’inflation a dépassé les niveaux souhaités par la Réserve fédérale américaine (Fed), mais les pressions domestiques, notamment salariales, évoluent positivement. Les économies atteignent rarement un état d’équilibre parfait, mais juste avant les élections récentes, l'économie américaine était presque aussi stable que possible.
L’impact des potentielles nouvelles politiques sur la croissance est ambigu, dépendant de leur ampleur, calendrier et séquençage : la déréglementation et l’assouplissement budgétaire seraient bénéfiques, mais un choc d’offre de main-d’œuvre, causé par des contrôles plus stricts de l’immigration et des expulsions potentielles, pourrait engendrer une stagflation. Les droits de douane, quant à eux, auraient des répercussions diverses selon les secteurs, agissant souvent comme une taxe sur la croissance mondiale.
Sur le front de l'inflation, les nouvelles mesures politiques sont orientées à la hausse. Nous ne prévoyons pas une flambée incontrôlée, mais le défi pour la Fed de maintenir l'inflation stable devient plus compliqué, ce qui justifie l'ajout d'une « optionnalité » dans ses récentes communications. La Fed pourrait interrompre son cycle de réduction des taux plus tôt que prévu, et pour cette raison, nous avons relevé notre probabilité d’un scénario sans atterrissage.
Prudence dans le contexte mondial
Il est paradoxal que les États-Unis, qui ont le moins besoin d’expansion budgétaire, soient le plus susceptibles de la mettre en œuvre. Pendant ce temps, les régions et pays nécessitant davantage de réformes structurelles et de demande cyclique via des politiques budgétaires hésitent à les adopter.
L’Europe risque d'être fortement touchée par la détérioration de l’environnement commercial et l’incertitude qui en découle pour les entreprises, ce qui pèsera sur des perspectives industrielles déjà faibles. Nos préoccupations concernant la croissance de la zone euro ces derniers mois se sont intensifiées avec la possibilité de frictions commerciales accrues.
Dans ce contexte, nous pensons qu’un soutien politique supplémentaire est nécessaire. Moins la politique budgétaire contribue, plus la Banque centrale européenne (BCE) devra intervenir sur le front monétaire. La chute de la coalition allemande est un prélude à des élections qui pourraient ouvrir la voie à une politique budgétaire plus expansionniste. Cependant, à l'approche de 2025, un resserrement budgétaire modéré semble prévu, surtout en France. Une politique trop prudente face aux défis considérables est à craindre.
Le budget britannique, prévoit un assouplissement budgétaire modéré pour les deux prochaines années, malgré des discussions centrées sur la nécessité d’augmenter les impôts et de restreindre les budgets. Cela complique la tâche de la Banque d'Angleterre pour ramener l'inflation à l'objectif, néanmoins, la dégradation observée des gilts depuis le budget présente des opportunités d'achat, car ils se sont décorrélés des données économiques.
Enfin, concernant la Chine, son économie s’est affaiblie depuis plusieurs trimestres, affectant le cycle manufacturier mondial déjà avant une potentielle escalade commerciale. Après des mesures d’assouplissement budgétaire en septembre, les dernières initiatives ont déçu face à l’ampleur des problèmes et à l’inefficacité de la politique monétaire. Nous continuons de surveiller de près les signes d’un « bazooka » plus puissant de la part des autorités chinoises, qui a encore le potentiel de provoquer un changement de paradigme s’il devait se produire.
Où se trouvent les opportunités ?
D’un point de vue stratégique, nous pensons que l’impact inflationniste des élections américaines accroît le risque d'un scénario sans atterrissage. Cela pourrait suggérer une sous-pondération des obligations américaines. Cependant, sur le plan tactique, les surprises économiques aux États-Unis sont élevées, le sentiment des investisseurs est devenu négatif et les valorisations se sont significativement améliorées. Nous pensons donc qu'une sous-pondération des obligations américaines n'est pas justifiée pour le moment. La patience est de mise.
Nous privilégions toujours la zone euro et les gilts britanniques pour les obligations à long terme. Les perspectives économiques y sont faibles, et les risques de droits de douane ajoutent des pressions supplémentaires. Les gilts, ayant chuté après le budget, offrent désormais des opportunités intéressantes après la réduction des positions surpondérées des investisseurs.
Nous considérons les devises comme un moyen alternatif d’exprimer les dynamiques divergentes entre les États-Unis et le reste du monde. L'impact d'une croissance européenne déjà faible, la probabilité d'une détérioration de l'environnement commercial mondial et la nécessité pour la BCE de compenser ce choc par de nouvelles mesures de relance sont autant d'éléments qui plaident en faveur d'un nouvel affaiblissement de l'euro par rapport au dollar américain.
En termes d’allocation d’actifs, nous avons encore réduit nos perspectives sur le crédit en raison de valorisations très serrées, qui, selon nous, n’offrent pas une marge suffisante de sécurité contre une éventuelle détérioration imprévue. Cela est particulièrement vrai aux États-Unis, mais le crédit de la zone euro a également été dégradé sur notre tableau de bord. Les obligations sécurisées passent à neutre, de même que les quasi-souveraines, bien que nous restions légèrement surpondérés dans ces dernières.
Les titres adossés à des créances hypothécaires d’agences représentent les meilleures opportunités de valorisation actuelles dans notre univers d'investissement, et ont été revalorisés à la hausse ce mois-ci. Ils restent notre option privilégiée pour l'allocation d'actifs.
S’abonner à nos paroles d’experts
Visitez notre centre de préférences et choisissez les articles que vous souhaitez recevoir.
Réservé exclusivement aux investisseurs et aux conseillers professionnels.
Ce document exprime les opinions du gérant ou de l'équipe citée et ne représente pas nécessairement les opinions formulées ou reflétées dans d’autres supports de communication, présentations de stratégies ou de fonds de Schroders.
Ce document n’est destiné qu’à des fins d’information et ne constitue nullement une publication à caractère promotionnel. Il ne constitue pas une offre ou une sollicitation d’achat ou de vente d’un instrument financier quelconque. Il n’y a pas lieu de considérer le présent document comme contenant des recommandations en matière comptable, juridique ou fiscale, ou d’investissements. Schroders considère que les informations contenues dans ce document sont fiables, mais n’en garantit ni l’exhaustivité ni l’exactitude. Nous déclinons toute responsabilité pour toute opinion erronée ou pour toute appréciation erronée des faits. Aucun investissement et/ou aucune décision d’ordre stratégique ne doit se fonder sur les opinions et les informations contenues dans ce document.
Les performances passées ne sont pas un indicateur fiable des performances futures. Les cours des actions ainsi que le revenu qui en découle peuvent évoluer à la baisse comme à la hausse et les investisseurs peuvent ne pas récupérer le montant qu’ils ont investi.
Les prévisions contenues dans le présent document résultent de modèles statistiques, fondés sur un certain nombre d'hypothèses.
Elles sont soumises à un degré élevé d'incertitude concernant l'évolution de certains facteurs économiques et de marché susceptibles d'affecter la performance future réelle. Les prévisions sont fournies à titre d'information à la date d'aujourd'hui. Nos hypothèses peuvent changer sensiblement au gré de l'évolution possible des hypothèses sous-jacentes notamment, entre autres, l'évolution des conditions économiques et de marché. Nous ne sommes tenus à l'obligation de vous communiquer des mises à jour ou des modifications de ces prévisions au fur et à mesure de l'évolution des conditions économiques, des marchés, de nos modèles ou d'autres facteurs.
Ce document est produit par Schroder Investment Management (Europe) S.A., succursale française, 1, rue Euler, 75008 Paris, France.
Authors
Thèmes