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Pourquoi les investisseurs ciblant le changement climatique doivent privilégier les acteurs les plus touchés

Maria Teresa Zappia explique pourquoi la « transition juste » vers une économie verte doit être centrée sur les populations.

08/11/2022
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Maria Teresa Zappia
Deputy CEO at BlueOrchard and Head of Blended Finance & Impact Management

La lutte contre le changement climatique est seulement en train de prendre forme, et ce sont essentiellement les économies les plus puissantes qui la définissent. Cela doit changer.  

La transition vers un monde bas carbone s'accélère. Le nombre de pays et d'entreprises qui ont pris des engagements en faveur de la transition de leurs activités vers la neutralité carbone a considérablement augmenté. En effet, 90 % du produit intérieur brut (PIB) mondial est désormais couvert par ces engagements.  

Mais cela ne suffit pas. Au vu des politiques et des actions effectivement mises en œuvre, le réchauffement devrait atteindre 2,7 degrés Celsius au niveau mondial. Pourtant, l'Accord de Paris de 2015 visait à limiter les hausses de température à long terme bien en dessous de 2 degrés Celsius – voire, idéalement, 1,5 degré Celsius. En outre, la population des pays émergents et des économies frontières, qui est la plus menacée, est mal équipée pour se protéger. Dans de nombreux cas, la capacité d'anticipation, de préparation et de réaction aux perturbations liées au changement climatique atteint déjà ses limites.  

Si le niveau de préparation des économies émergentes et frontières varie considérablement, il demeure dans l'ensemble très faible. Nombre de ces économies sont aujourd'hui plus dépendantes de l'utilisation des combustibles fossiles que les pays développés ; autrement dit, elles sont nettement moins bien placées pour atteindre l'objectif « zéro émission nette ». 

Pour viser une transition juste vers une économie moins carbonée, plus économe en ressources et plus inclusive sur le plan social, les gouvernements et les entreprises doivent prendre des mesures supplémentaires pour réaliser leurs engagements. Et ce, afin de construire une économie verte tout en centrant leurs efforts sur les populations et les droits humains. Ils doivent notamment faire en sorte que les personnes les plus touchées par le changement climatique soient en mesure de se protéger.  

Il en va de même pour les investisseurs privés. Beaucoup le reconnaissent et se demandent comment combiner les initiatives économiques qui limitent les émissions de carbone et la création d’opportunités pour les salariés, les travailleurs et les communautés locales.  

La réponse est (au moins) triple. Au-delà de la réduction des émissions, les investisseurs doivent s'engager dans des stratégies d'adaptation au changement climatique – ce que le Pacte Climat de Glasgow définit comme « la nécessité d’aider ceux qui sont déjà impactés par le changement climatique ». Ils doivent également œuvrer à l'amélioration des produits financiers et d'assurance conçus pour les personnes en situation de risque, et mesurer l’impact de ces produits en s’appuyant sur le retour d'information des communautés locales.  

Investir dans des stratégies d'adaptation au changement climatique 

En premier lieu, il est clair que nous n'atteindrons pas l’objectif « zéro émission nette » d'ici le milieu du siècle sans investir des billions de dollars – pas encore débloqués à ce stade.  

Les pays développés sont tenus de mobiliser 100 milliards de dollars chaque année en financement climatique pour soutenir les pays en développement. Cependant, pour déployer efficacement ces fonds, les investisseurs ont besoin d'exemples réels d'investissements qui favorisent une transition juste, dans une approche générale de justice en matière de climat.  

L’initiative « Just Transition Finance Challenge » de l’Impact Investing Institute, dont les participants fondateurs sont des détenteurs et gestionnaires d'actifs traditionnels représentant au total 4 400 milliards de dollars, vise à fournir ces exemples afin de contribuer à déplacer les flux financiers qui tentent de relever le défi du changement climatique. Jusqu'à présent, les investisseurs se sont principalement concentrés sur l'atténuation du changement climatique grâce à la réduction des émissions, mais la Conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP26) de 2021 a franchi une étape vers l'adaptation. Les participants ont déterminé que 50 % des allocations totales du financement climatique pour les marchés émergents devaient cibler stratégiquement l'adaptation au changement climatique, la majorité étant destinée aux pays vulnérables.

Alors que les coûts d'adaptation pourraient atteindre 300 milliards de dollars par an dans les économies émergentes en 2030, l'allocation envisagée par la COP26 semble à première vue une mesure simple et réalisable. Toutefois, les dernières données disponibles suggèrent que le soutien financier, dans tous les pays, reste bien inférieur pour l'adaptation que pour l'atténuation. Une accélération des activités d'adaptation – y compris l'augmentation de la préparation des groupes les plus touchés par le changement climatique – est essentielle, et l'innovation sera la clé du succès. 

Les stratégies innovantes d'adaptation au changement climatique peuvent prendre diverses formes, dont le développement de cultures plus résilientes et de nouveaux systèmes d'irrigation. Parmi les stratégies que nous avons étudiées figure la création d'un nouveau marché de l'assurance climatique. L'investissement d'impact spécialisé dans les marchés émergents donne accès à une assurance climatique sur mesure pour les micro, petites et moyennes entreprises ainsi que pour les ménages à faible revenu, qui couvre les événements climatiques extrêmes. L'assurance est la clé de la subsistance et de la résilience de nombreux petits agriculteurs, car la culture et le bétail assurés constituent leur unique source de revenus. Les stratégies d'adaptation au changement climatique sont aujourd'hui un pilier de la plupart des offres de financement climatique.  

Comment protéger les communautés à faible revenu grâce à l'assurance climatique  

Depuis huit ans, BlueOrchard se concentre sur la protection des communautés à faible revenu via l'assurance climatique. Au cours de cette période, nous avons accompagné la distribution de l'assurance climatique par l'intermédiaire d'institutions financières locales ayant une clientèle finale d'entrepreneurs. Nous avons également investi tout au long de la chaîne de valeur des compagnies d'assurance, des courtiers, mais aussi des sociétés d'assurance du secteur InsurTech qui créent de nouvelles technologies, notamment des outils de prévision des données météorologiques permettant de mieux évaluer les risques liés au climat.  

À titre d’exemple, on peut citer Skymet Weather Services Private Ltd, qui fournit des services d'information sur les conditions météorologiques et le rendement des cultures au secteur de l'assurance en Inde, via plus de 4 000 stations météorologiques automatisées à travers le pays. Notre investissement a permis à la société d'élargir son réseau de stations et d'obtenir de nouveaux contrats liés aux données météorologiques et à la mesure du rendement des cultures. Plus de 20 millions d’agriculteurs sont désormais en contact avec la société, ce qui leur permet de mieux gérer l'impact des événements climatiques sur les récoltes par le biais d'une assurance disponible sur smartphone, liée à des indices, et couvrant aussi bien le bétail que les récoltes. 

Un autre exemple est Royal Exchange General Insurance Company Ltd, une compagnie d'assurance du Nigeria bénéficiant de plus de 100 ans d'expérience sur le marché national et d’un portefeuille important dans le secteur agricole. Alors que la société propose une gamme complète de produits d'assurance-risque généralistes et spécialisés, notre investissement étendra leur portée aux agriculteurs à faible revenu particulièrement vulnérables au changement climatique. 

Nous avons également noué un partenariat avec la Fondation Kashf, une organisation non bancaire de microfinance en Asie du Sud, qui est devenue le plus grand distributeur de solutions de micro-assurance au Pakistan. Cette fondation propose des contrats de micro-assurance à plus de trois millions de clients, principalement en assurance-santé et en assurance-vie. Kashf a utilisé notre financement pour lancer son premier produit rural en 2017 – un prêt pour l’élevage du bétail appelé Kashf Mahweshi Karza. Ce produit comprend une assurance pour les bovins laitiers au Pakistan, qui couvre le coût des remboursements en cas de maladie ou de décès de la vache. Ces versements permettent aux agriculteurs qui perdent du bétail de racheter des animaux et les protègent ainsi du risque de défaut et d’une éventuelle dégradation de crédit. Ce type de filet de sécurité est particulièrement important face au changement climatique, car l'augmentation des événements tels que la sécheresse, les inondations et les maladies a une incidence sur les taux de mortalité des animaux. 

Mesurer l'impact à travers le retour d'information des communautés locales 

Pour parvenir à une transition juste, il est important d'intégrer les points de vue de toutes les parties prenantes à la conception, au suivi et à l'évaluation des produits.  

Dans l'ensemble, les réponses aux enquêtes élaborées par BlueOrchard pour vérifier que nous tenons nos promesses montrent que les communautés ont bénéficié de l'assurance climatique. Deux tiers des personnes interrogées (assurées ou non) avaient subi un choc climatique. En outre, 45 % des personnes assurées ont pu utiliser leur épargne après l'événement climatique. En revanche, seules 18 % des personnes non couvertes ont pu compter sur leur épargne. Ainsi, les répondants assurés étaient 10 % plus susceptibles de se remettre du choc sans être contraints de vendre un actif.  

Par conséquent, les personnes ayant demandé une indemnisation avaient au moins deux fois plus de chances de surmonter ce choc que les autres : 50 % des assurés se sont redressés, contre seulement 19 % des non assurés. Les bénéficiaires ont globalement réinvesti les versements d'assurance dans leurs activités.  

Ensemble, les marchés émergents devraient devenir les plus influents au niveau mondial. À certains égards, c’est déjà le cas. Ils englobent la majeure partie de la population mondiale, produisent la majeure partie du PIB mondial et progressent plus rapidement que les économies développées. Assurer la résilience à long terme des communautés vulnérables face à l'évolution du climat revient à placer les populations au cœur de la transition vers une économie verte. À ce stade, même si l'action contre le changement climatique est toujours en retard sur notre ambition mondiale, il est donc essentiel d'équiper au mieux les personnes les plus susceptibles de subir les aléas du climat.  

Les performances passées ne sont pas un indicateur fiable des performances futures. La valeur des investissements ainsi que le revenu qui en découle peuvent évoluer à la baisse comme à la hausse et les investisseurs peuvent ne pas récupérer le montant qu’ils ont investi. Les variations des taux de change peuvent entraîner une hausse ou une baisse de la valeur des investissements. Toute référence à des secteurs/pays/actions/valeurs mobilières est fournie à titre d’illustration uniquement et ne constitue pas une recommandation d’achat ou de vente des instruments financiers ou valeurs financières, ou d’adoption d’une quelconque stratégie d’investissement. 

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